TEXTS

« Les peintures de Lise Stoufflet, aussi agréablement fascinante soient-elles, parlent de l’un de plus grands tourment humain. Ce monde accessible par les fenêtres de détails peints, rappelle les rêves intimes, les pensées fantasques et les images fantasmées. Là c’est toute la force de la solitude qui éclate, évidente et pourtant indicible. Niché dans les couleurs, se reflète ce qu’il est impossible d’exprimer. « Tout le monde est seul dans sa tête » énonce simplement l’artiste en souriant. Une sorte de folie douce qui danse joyeusement dans nos chairs et contre laquelle chacun de nous lutte. Alors, pour tisser un lien, pour pouvoir se sentir un peu moins seuls, les personnages se ressemblent : ils s’habillent pareils, ils partagent des traits communs, ils créent une norme à laquelle il faut s’accrocher. Les peintures de Lise Stoufflet, font un pas de côté vis-à-vis de ces considérations et les révèlent d’autant plus. L’étrange et l’indicible rencontrent la norme. Ensembles, ils racontent les liens qui unissent les êtres, ceux des relations sentimentales, ceux des explosions d’affection, ceux des naïvetés, des craintes et des obsessions personnelles. L’effort contre la solitude se transforme en clonage : plus personne n’est seul puisqu’il y a ressemblance avec l’autre. Et de cette ressemblance presque obligatoire, naissent des torpeurs et des obligations d’appartenance. Des obligations qui effacent l’authenticité et qui obligent à la norme. La boucle se boucle, et mieux vaudrait tresser des prairies… »

Sandra Barré

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“ Les toiles de Lise Stoufflet ont ceci de commun qu’elles présentent des situations à la fois arrêtées et menaçantes. S’y côtoient le paisible - une eau stagnante, un corps au repos, des figures contemplatives - et le trouble - la catastrophe, le monstre, le risque de blessure -. Entre les deux, une absence totale de corrélation : le danger ne suscite aucune réaction. De fait, l'événement, l’étrange ou l’anormal accèdent au statut d’image latente qui s’inscrit dans la durée et l’environnement plutôt que dans l’instant et la rupture. Ce qui est précisément intéressant ici, c’est que les choses de l’ordre du caché (l’inconscient, le refoulé, le rêve) sont douées d’une réelle forme visuelle : nul doute sur la nature de ce que l’on voit. La vraie question se situe sur les mécanismes magiques, ludiques ou imaginaires de l’image, ce qu’elle suscite ou révèle. Afficher les artifices, pointer du doigt la fausseté de la représentation : Lise Stoufflet ne dissimule en rien la matérialité et la spécificité de la peinture. Il ne s’agit pas de faire illusion. Au contraire, la peinture affiche un méta-discours, elle désigne ses moyens et ses fonctions propres en représentant plastiquement ce qui n’est pas réel. Les formes sont essentialisées de façon générique, délestées de tout détail superflu et liées entre elles par un filtre ambiant et scénographique comme une signalétique émotionnelle. Rouge, bleu, orange correspondent à un état psychique sans pour autant entrer dans le domaine du symbolique. Il s’agirait plus exactement d’une gamme de couleur spécifique comme une catégorie d’effets dans un jeu qui garde ses règles secrètes. Il en va d’une peinture qui donne un statut sémiotique à la représentation, c’est-à-dire qu’elle lui confère le pouvoir de créer des signes autonomes car affranchis de la narratologie commune. Ces situations pourraient tout simplement être considérées, rhétoriquement, comme diverses figures de substitution : métonymie, mise en abîme, métalepse, analogie ; formes qui bouleversent les mécanismes logiques du récit en les remplaçant par une suite absurde ou une simultanéité discordante. La chose n’est pas comme le bon sens voudrait qu’elle soit et c’est là qu'opère le signe : l’image est dans le débordement, l’éclatement, le circulaire, non dans la lecture linéaire. Alors l’image révèle sa véritable nature : celle d’un bâtisseur de mystères et d’énigmes qui pétrit les matières fluides et psychiques dans une forme concrète. Parce qu’elle échappe à l’interprétation et à l’explication, cette image s’appréhende par d’autres biais. Peut-être par celui qu’André Breton appelle “l’épreuve du réveil”, c’est-à-dire en fonction de l’émotion que l'œuvre procure lorsque le dormeur la découvre en se réveillant. “

Elora Weill-Engerer

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“ La part de rêve 

La démarche picturale de Lise Stoufflet (née en 1989, diplômée des Beaux-Arts de Paris en 2014, et cofondatrice de l’atelier collectif du Houloc à Aubervilliers) s’inscrit dans un certain nombre de lieux communs de l’art contemporain. Une peinture narrative brouillant les frontières entre réalité et fiction, dont la clé de compréhension échappe au spectateur et lui laisse toute liberté d’interprétation. À y regarder de plus près, les toiles de Lise Stoufflet nous situent plutôt du côté des songes et se parent d’une valeur onirique et psychanalytique. Les thèmes de l’enfance, du jeu (les cartes de tarot de Big Destiny) et de la pulsion de mort (des personnages allongés sur le sol, au visage masqué, constituent le leitmotiv de compositions telles que Relationship), voire d’une sexualité refoulée (un cygne blanc se baigne avec une femme à la chevelure de feu dans Léda), en émergent clairement. Le tout dans une ambiance ésotérique faite d’intérieurs feutrés, aux moquettes et aux rideaux épais, comme dans un théâtre d’illusions. Ces contes enfantins hantés de fantômes et scandés de fuites précipitées, à l’instar du grand format Faire un Tour, déployé comme une installation, nous renvoient finalement vers des compositions surréalistes. Où, plus qu’une fenêtre ouverte sur le monde, le tableau fonctionne comme le révélateur des besoins fondamentaux de l’âme humaine. Cette peinture aux personnages et aux objets archétypaux, exécutée dans un style illustratif haussé de gammes rose et bleue, ou de doux aplats pastel, renoue ainsi avec les icônes d’un inconscient commun.”

François Salmeron 

CV

LISE STOUFFLET  
Née en 1989, vit et travaille à Paris.  

ÉTUDES / PRIX / RÉSIDENCE  


2020 - Troisième Prix Marin 2021 (Prix Antoine Marin 2021)  
2020 - Résidence « Les Ateliers du Plessix-Madeuc », 3 mois, Saint-Jacut-de-la-mer  
2015 - Résidence « Astérides », La Friche Belle de Mai, Marseille  
2014 - Diplôme National Supérieur d’Art Plastique, ENSBA Paris  
2012 - Prix Antalis, Biennale de Gravure de Sarcelles  
2011 - Prix de Dessin Diamond, ENSBA Paris  


EXPOSITIONS PERSONNELLES  


2023 - Réalisation de deux œuvres in-situ, La Samaritaine, Paris  
2022 - « Calm down », Galerie Pact, Paris  
        - « Interlune », Hangar 107, Rouen  
2021 - « Calendrier de l’Avent Monumental », Centre d’Art de Meymac  
        - « Fabulations », Galerie Pact, Paris (commissariat Claudia Cargnel)  
2019 - Studiolo, Milan (commissariat Maria-Chiara Valacchi)  
2018 - « Les Confidences », Art Mate, Paris  
2016 - « Les Barreaux #3 », Espace LeChassis, Paris  
2015 - « Permesse », Underconstruction Gallery, Paris  


EXPOSITIONS COLLECTIVES  


2023 - « Les Fleurs du Mal », Maison Guerlain, Paris  
        - « Substance », Collection MC, Monaco  
        - « Waall.1 », Galerie Au Roi, Paris (commissariat Togaether)  
        - « Breathless », Myriam Chair Galerie, Paris (commissariat James Bolton)
2022 - « Tu es métamorphose III », Galerie Pact, Paris  
        - « Mouthed Echoes », Lyles & King Gallery, New York  
2021 - « Peinture au mètre », Espace à vendre, Nice  
        - « The Ogre.net », Galerie Tarasiève, Paris  
        - « Échappée », La Peau de l’Ours Gallery, Bruxelles  
2020 - « Comme un parfum d’aventure », Musée d’Art contemporain de Lyon  
        - « Tutorial », Spinnerei, Leipzig  
        - « Inner Escape », HOFA Gallery, Londres  
        - « High Voltage », Nassima-Landau Project, Tel Aviv  
        - « I want to feel alive again », Lyles & King Gallery, New York  
        - « When spiders unite they can tie down a lion », Daniel Raphael Gallery, Londres  
        - « Visible à l’œil nu », Salon Première Classe, Paris  
2019 - « Biennale de Paname », La Maison Rouge, Paris  
        - « OFF Art-O-Rama 2019 », Marseille  
        - « Ripe Beings », White Crypt, Londres  
        - « Clôture 06/2016-06/2019 », Espace Arondit, Paris  
        - « Paris Peinture Plus », Galerie MR14, Paris  
        - « Images et curiosités », Villa Belleville, Paris  
        - « Feux », Espace Arondit, Paris (collectif Le Paintagone)  
2018 - « Blind date », Galerie Provost Hacker, Lille  
        - « Less is more-Wenigher ist mehr », Galerie du Crous, Paris  
        - « Madame M », Joyce Gallery, Paris  
        - « 18 x 13 », Galerie CDLT+, Liège  
        - « Novembre à Vitry 2018 », Galerie Jean-Collet, Vitry-sur-Seine  
        - « Recto/Verso », Fondation Louis Vuitton, Paris  
2017 - « Greffes », Art Club #18, Villa Medicis, Rome  
        - « La Saga », Galerie Double V, Marseille  
        - « Novembre à Vitry 2017 », Galerie Jean-Collet, Vitry-sur-Seine  
        - « Un monde in-tranquille », Centre d’Art contemporain de Meymac  
        - « The Smell Of The Moon », Galerie Bugada & Cargnel, Paris  
        - « Enchantment », Air Project Gallery, Genève  
        - « Peindre, dit-elle (chap. 2) », Musée des Beaux-Arts de Dole  
2016 - « La force de la peinture », Galerie du Comble, Virton  
        - « Autofictions », Galerie Underconstruction, Paris  
        - 61e Salon de Montrouge  
        - « Sans Titre 2016 », Paris  
        - « Only lovers », Galerie Le Cœur, Paris  


AUTRES PROJETS  

2023 - Co-présidente de l’association Le Houloc  
2018 - Réalisation de deux fresques monumentales à Royal Hamilius (Norman Foster), Luxembourg  
2016 - Présidente de l’association Le Houloc  
ÉDITIONS / PUBLICATIONS  
2022 - « Portrait.s d’atelier.s », Le Houloc avec Thomas Fort  
2019 - Point Contemporain, numéro spécial Le Collective, Marseille  
2018 - Papier Magazine, numéro 7  
        - « 50-52 », 11-13 Editions  
2017 - « Lise Stoufflet - Dorica Castra », monographie, La Nouvelle École Française  
        - « Peinture contemporaine », Athénaïs Rz, éditions du Comble
2014 - « Danoisie », Raphaël Tiberghien, éditions Stéphane Crémer